lundi 14 décembre 2009

GPA: Manifeste pour la défense des plus vulnérables


Prendre en compte la souffrance des couples infertiles ne peut justifier de transgresser des principes qui fondent notre vie collective et notamment le devoir de protection des plus vulnérables. La gestation pour autrui ouvre la voie à des pratiques hautement contestables: l'exploitation des femmes, la promotion du "tout génétique", la programmation d'enfants conçus pour être abandonnés par la femme qui les a portés.


L'exploitation des femmes
Que la pratique soit  légale ou non, la mère porteuse est dans la quasi totalité des cas d'un milieu socio-économique et culturel défavorisé par rapport à celui du couple demandeur. Ce simple constat devrait nous arrêter or, ce n'est pas le cas. Les mères porteuses seraient sélectionnées en fonction de leur capacité à consacrer, par altruisme, neuf mois (plutôt douze) de leur existence à porter l'enfant d'un couple en s'interdisant de se fantasmer comme mère,  ce qui s'apparente à un déni de maternité, tout en gardant la possibilité de se rétracter après la naissance. Pour soulager notre conscience? Quel professionnel peut s'autoriser à déclarer telle femme "bonne pour le service"? La loi doit-elle permettre des conventions permettant à une femme de consentir à sa propre aliénation organique et à s'exposer à des risques corporels (ceux communs à toute grossesse) et psychiques ?
Les conséquences sur son couple et sur ses propres enfants qui verraient leur mère donner le bébé qu'elle porte ne sont pas envisagées...pas plus que la place de l'enfant "porté" si elle se rétractait. Faut-il encourager des femmes consentantes, imaginant le plus souvent réparer une blessure ancienne plus ou moins enfouie, à embarquer leur famille dans cette aventure? On ne peut concevoir que ces femmes ne soient pas rémunérées –on appellerait ça une indemnisation – ce qui revient à leur demander de se vendre pour produire une marchandise: l'enfant.
 LA PROMOTION DU "TOUT GÉNÉTIQUE"
Le couple demandeur verrait se réaliser son souhait d'élever un enfant "de ses gènes". Démarche bien différente de l'adoption qui valorise la parentalité d'intention, du don de sperme, d'ovule ou d'embryon, anonyme et gratuit, qui relativise l'apport du génétique. Il ne peut être comparé au don d'organe sauf à considérer l'enfant comme un "organe". Cette définition de l'individu par ses seuls gènes, évoquant le "pedigree" dont on sait les usages abusifs qui peuvent en découler va à l'encontre des valeurs de mixité et d'ouverture à l'autre.
L'ENFANT
L'enfant tant désiré est le grand oublié: qu'est-ce qu'être un foetus porté par une femme instrumentalisée? Nous connaissons l'importance des échanges entre la mère et le foetus sur son développement physique, psychique et affectif. Nous connaissons les effets délétères des séparations précoces sur la vie entière. Les médecins doivent-ils se prêter à la conception d'enfants programmés pour être donnés par la femme qui les porte?
  Une loi peut limiter les dérives mercantiles des intermédiaires voire le tourisme procréatif. Il n'empêche qu'aussi restrictive soit-elle, elle légitimerait, avec la participation du médecin et du juge, des pratiques que nous condamnons parce qu'elles remettent en cause la protection qu'on doit aux plus vulnérables.

Laure Adler (journaliste), Sylviane Agacinski (philosophe), Paul Atlan (gynécologue), Alain Amselek (psychanalyste), Association "Choisir la Cause des femmes", Pr Jean-Marc Ayoubi (obstétricien), Laurence Azoux-Bacrie (avocate), Françoise Barré Sinoussi (Prix Nobel de Médecine 2008), Pascal Boileau (néonatalogiste), Clarisse Baumann (généticienne, pédiatre), Isi Beller (psychanalyste), Laurence Bellon (magistrat), Catherine Bergeret-Amselek (psychanalyste), Roger Bessis (échographiste), Micheline Blazy (psychiatre), Pr Pascal Boileau (néonatalogiste), Carole Bouquet (actrice), Pr Danièle Brun (psychanalyste) Marie-Claire Busnel (chercheur), Monique Bydlowski (psychiatre), Francine Caumel Dauphin (sage-femme), Pr Hervé Chneiweiss (neuroscientifique), Jacques Cheymol (pédiatre), Catherine Clément (écrivain), Françoise Collin (philosophe), Boris Cyrulnik (psychiatre), Pr Liliane Daligand (psychiatre, expert), Pr Bernard Debré (urologue), Pr Jean-François Delfraissy (médecin), Pr Pierre Delion (pédopsychiatre), Irène Diamantis (psychanalyste), Jacques Digneton (psychanalalyste), Catherine Dolto (haptothérapeute), Pr Jacques Donnez (obstétricien), Pierre Droulle (radiologue),Charlotte Dudkiewicz-Sibony (psychanalyste), Caroline Eliacheff (psychanalyste), Sylvie Epelboin (obstétricienne), Pr Jean-Paul Escande (dermatologue), Jean-Marie Fayol-Noireterre (magistrat), Isabelle Filliozat (psychothérapeute), Pr René Frydman (obstétricien), Danièle Ganancia (magistrat), Sylviane Giampino (psychanalyste), Pr Claude Griscelli (pédiatre), Gisèle Halimi (avocate), Nathalie Heinich (sociologue), Bénédicte Heron (neuropédiatre),  Delphine Heron (généticienne), Nancy Huston (écrivain), Bernard Kanovitch (médecin), Marin Karmitz (cinéaste), Axel Kahn (Président de l'Université Paris-Descartes), Blandine Kriegel (philosophe), Béatrice Koeppel (psychologue CNRS), Sylvie Labrune (pédiatre), Philippe Labrune (pédiatre), Louise Lambrichs (écrivain), François Lévy (psychanalyste), Pr Olivier Lyon-Caen (neurologue), Pierre Monin (pédiatre), Luc Montagnier (Prix Nobel de médecine 2008), Aldo Naouri (pédiatre), Juan-David Nasio (psychanalyste), Mathilde Nobécourt (éditrice), Pr Jean-François Oury (obstétricien), Olivier Pambou, Evelyne Petroff (obstétricienne), Jean-Daniel Rainhorn (professeur en santé internationale et action humanitaire), Danielle Rapoport (psychologue), Pr Marcel Rufo pédopsychiatre), Pascale Saugier-Veber (généticienne), Jacques Sédat (psychanalyste), Conrad Stein (neurologue), Myriam Szejer (psychanalyste), Annick Toutain (généticienne), Charlotte Ullmo (étudiante), Pr Michèle Uzan (obstétricienne), Pr Serge Uzan (obstétricien), Catherine Vanier (psychanalyste), Jean-Pierre Winter (psychanalyste), Jean-Philippe Wolf (biologiste)